Peut-on inculquer à ses enfants le respect de Mère Nature en même temps que la haine envers leur mère biologique ?
On peut raisonnablement en douter. 
Quoi qu’il en soit, l’amour de Xavier Fortin pour Catherine Martin semble avoir été sincère, durant leurs sept années de vie commune. Il y consacre quelques pages dans son livre, contrairement à la mère de ses enfants qui résume (dans son propre livre) leur relation en quelques mots peu flatteurs. 

Il est important de considérer cet aspect des choses – le respect que les parents se vouent encore – avant de porter un jugement objectif sur ce genre d’histoire, qui s’apparente habituellement à un combat entre deux parents que tout semble opposer. 

Avant toute chose, « Hors système » n’est pas l’histoire d’un kidnapping parental « conventionnel ». 
Chaque enlèvement parental est d’ailleurs différent. On ne souligne jamais assez la nécessité d’identifier les caractéristiques intrinsèques de chacun de ces drames familiaux. Si on ne fait pas cet effort, on risque malheureusement de prendre des dispositions erronées pour résoudre ces conflits. 

Dans le cas présent, il s’agit d’abord d’un contre enlèvement. De la part d’un parent désespéré, qui ne souhaite pas être effacé de la mémoire de ses enfants, comme Xavier Fortin en ressent légitimement la menace, suite à l’enlèvement précédent de ses enfants par leur mère Catherine Martin. 
Afin d’éviter les préjugés sexistes, il est important de souligner que le parent qui effectue un contre enlèvement est parfois une femme et que le reste de nos considérations ne changeraient pas. Pour autant que le cas soit similaire bien entendu.

Tous les parents qui ont vécu un enlèvement parental savent à quel point cet événement est traumatisant. Dans le cas présent, cette connaissance était partagée puisque chaque parent a expérimenté sur l’autre les conséquences d’un tel acte. D’ailleurs, Xavier Fortin s’étend lui aussi, quoique nécessairement beaucoup moins que Catherine Martin, sur la douleur ressentie lorsque ses enfants ont été enlevés sans préavis par leur mère, avant que lui-même ne se décide de lui rendre la pareille. Lors de ces passages à l’acte, chaque parent juge habituellement qu’il agit dans le meilleur intérêt de « ses » enfants. Cette vision réductrice ne résiste pas à l’analyse, puisqu'aussi bien Xavier Fortin que Catherine Martin attribuent aux enfants des réactions diamétralement opposées dans la même situation. En d’autres termes, lorsque Xavier Fortin part avec ses enfants dans une camionnette pour ne plus revenir, il lit de la joie sur leur visage, alors que leur mère les voit atterrés de la quitter. 

Le dénominateur commun de tous ces parents qui enlèvent leurs enfants est donc, non seulement le sentiment d’agir exclusivement pour le bien de leurs enfants, alors que c’est avant tout un besoin personnel qu’ils satisfont, mais de plus, ils attribuent à leurs enfants un sentiment de joie et de délivrance. 

Une fois l’enlèvement commis, cette fausse perception de la réalité crée une disposition d’esprit réfractaire à tout changement, et constitue durablement le plus grand obstacle à la résolution du conflit. 

Ainsi un événement radical, comme l’enlèvement parental, qui, avec un tant soit peu d’empathie, conduirait à une prise de conscience salutaire ; créant ainsi un terrain favorable pour permettre une résolution satisfaisante pour toutes les parties concernées, ne pèse pas bien lourd face au jusqu’au-boutisme de certains parents. 

Bien sûr, tous les parents qui ont subi l’enlèvement de leurs enfants ne se résolvent pas à effectuer des contre enlèvements. Ceci pour de multiples raisons : parce qu’ils font confiance à la justice, parce qu’ils ne veulent pas faire subir le même sort à autrui, parce qu’ils refusent de prendre en otage leurs enfants, par peur de rétorsion, parce qu’ils se sentent impuissants, parce qu’ils ont l’espoir de voir la situation avec leur ex-partenaire s’arranger, et finalement tout simplement parce qu’ils ignorent où se trouvent leurs enfants. 

En règle générale, les parents kidnappeurs ne manifestent aucun désir de conciliation et de médiation, surtout s’ils ont trouvé refuge auprès d’une juridiction étrangère qui leur offre protection et impunité. 
Eh oui ! Malgré les conventions internationales, de nombreux parents d’enfants kidnappés ne peuvent absolument pas faire appliquer les décisions de justice prises chez eux ! 
Ce constat montre que la confrontation, par avocats et tribunaux interposés, est rarement une solution appropriée.

Dans le cas présent, apparemment, Xavier Fortin a bien tenté à plusieurs reprises de favoriser une solution amiable par le dialogue. Catherine Martin s’y est pourtant toujours opposée. 

En règle générale, les parents kidnappeurs ont une vision très manichéenne de la réalité et leurs enfants adoptent fréquemment leur point de vue. Dans le cas présent, il ne semble pas que ce lavage de cerveau systématique ait eu lieu. Certes, on peut comprendre qu’un parent traqué par toutes les polices de France (avec une condamnation d’incarcération prise à son encontre par défaut) puisse ne pas user de paroles amènes au sujet de son ex conjoint. Cependant, la maturité intellectuelle des fils Fortin, après ce qui aurait dû constituer un calvaire pour eux, est tout simplement étonnante. Leurs raisonnements tiennent la route. Ils vont au fond des choses et n’esquivent pas la confrontation avec la réalité. 
La comparaison avec Nicolas, le premier fils de Catherine Martin, est d’ailleurs très édifiante. Invité par les fils Fortin à venir visiter Xavier Fortin en prison, Nicolas refuse, de peur de céder à son envie de lui régler son compte. Pourtant, durant ses sept années de vie commune avec Catherine Martin, Xavier Fortin s’est occupé de Nicolas, comme s’il s’agissait de son propre fils. 

En règle générale, les parents kidnappeurs se font volontiers passer pour des victimes et n’assument aucunement la responsabilité de leurs actes. 
Concernant les parents victimes de l’enlèvement de leurs enfants, la plupart restent dignes malgré leur profonde douleur. Ils n’éprouvent pas forcément le besoin de déballer sur la voie publique leurs états d’âme, ni de rallier à leur cause toutes les personnes qu’ils rencontrent. Ils savent reconnaître leurs erreurs et se remettent en question si nécessaire. Pour leur santé, ils privilégient la voie de l’apaisement. Ils gardent confiance et vivent en paix avec leur conscience. Parfois, ils refondent un foyer, montrant par l’exemple qu’ils sont aussi des parents responsables.

Dans le cas présent, il ne semble pas que Xavier Fortin, le kidnappeur dans les faits, ait été un parent indigne ou irresponsable. Il n’a jamais reçu de pension alimentaire de son ex-compagne pour assurer l’éducation de ses enfants. Il était présent auprès d’eux. Il a essayé de leur transmettre des valeurs indéniables. Comme le respect de soi et des autres. 
C’est cependant cette valeur fondamentale qui semble faire défaut au récit de Catherine Martin dans son livre « Au nom de mes fils ». Que ce soit ses ruptures sentimentales, les relations avec ses fils, son employeur, la police chargée de récupérer ses enfants, dès que cela ne se déroule pas comme prévu, elle verse des larmes amères en soulignant les manquements des autres à son égard. 
Comme parent ayant vécu le même drame, on peut certes comprendre sa douleur, mais il y a quelque chose de pathétique dans cet apitoiement constant sur soi-même. De terriblement destructeur aussi. Puisque le malheur de Catherine Martin provient essentiellement de sa vision dichotomique de la réalité. Un penchant dont l’origine est probablement antérieure au drame vécu avec Xavier Fortin.
Catherine Martin ne peut imaginer un seul instant que ses enfants puissent exister sans elle, et qu’ils puissent ne pas se sentir des victimes, comme elle. 

Le livre de Catherine Martin, « Au nom de mes fils », qu’il est conseillé de lire pour avoir une vision plus objective de cette affaire, montre toutefois aussi la progression spirituelle de son auteure ainsi que ses indéniables qualités humaines. Toutefois, dans le conflit avec son ancien compagnon, les prises de conscience salutaires de Catherine Martin restent figées au stade de l’écriture. Ainsi, lors des retrouvailles tant attendues, Catherine Martin vit encore avec l’illusion que ses enfants vont prendre parti pour elle et faire condamner leur père. Le spectacle de cette mère qui n’a plus que les médias pour épancher sa douleur est pathétique. Plus affligeant est néanmoins le besoin de croire au nouveau mythe qu’elle a construit : ses enfants sont de petits soldats à la solde de leur père. 

Catherine Martin explique alors devant les caméras, en reprenant mot pour mot les considérations d’experts en la matière, de quelle manière ils ont été manipulés et quels sont les effets terrifiants de la mainmise paternelle. Tout ceci après avoir revu ses fils et passé du temps avec eux !
Cela consiste en quelque sort à leur dire : « Mes petits loups, votre père a fait de vous des monstres. Je déteste ce que vous êtes devenu. » 

« Au nom de mes fils » est censé démontrer les effets ravageurs du kidnapping parental, mais à la fin de ce livre, il demeure une question lancinante. 

Si Catherine Martin avait répondu favorablement aux invitations de conciliation faites par les émissaires de Xavier Fortin que se serait-il passé ? 

Il est conseillé aux lecteurs, qui se trouvent dans une situation comme celle de Catherine Martin ou de Xavier Fortin, de lire attentivement et avec un esprit critique ces deux récits, afin ne pas répéter les mêmes erreurs. 

Hors système
Xavier Fortin, Shahi Yena Fortin, Okwari Fortin